Une optique à l’échelle atomique
Les dispositifs opto-électroniques ont l’avantage d’allier à la souplesse des circuits électroniques la rapidité due à la vitesse de la lumière. Pour les miniaturiser, on utilise des matériaux à 2 dimensions ayant de fortes interactions avec la lumière. Pour contrôler optiquement le trajet de la lumière, il faut pouvoir disposer de matériaux ayant un fort indice de réfraction. La molybdénite, MoS2, que l’on obtient aisément en couches minces satisfait à ces critères. Des scientifiques australiens et américains (Australian National University, Canberra, Australie et University of Wisconsin, Madison, USA) ont réussi à fabriquer l’élément optique le plus mince au monde, constitué de quelques couches monoatomiques de MoS2 d’épaisseur inférieure à 6,3 nm. Ils ont aussi réalisé des réseaux à partir de quelques couches monoatomiques de MoS2.
La possibilité de contrôler le flux optique dans des films minces ouvre une nouvelle voie vers la miniaturisation des composants optiques et de leurs fonctions les plus avancées.
Ces composants agissent sur un faisceau optique en modifiant son front d’onde par les variations de chemin optique que celui-ci subit en les traversant.
Dans le cas d’un milieu homogène, où l’indice de réfraction n est constant, le chemin optique Lo d’un point A à un point B en ligne droite, est simplement donné par Lo = n.AB, où AB est la distance géométrique entre A et B. On peut aussi écrire Lo = (c/v)AB, où c est la vitesse de la lumière dans le vide, v celle de la lumière dans le milieu traversé. Crédit Wikipedia. Domaine public.
Les composants optiques miniaturisés réalisés à Canberra sont obtenus à partir du dépôt de couches minces de MoS2 obtenues par exfoliation sur un substrat de SiO2 .
L’obtention de chemins optiques géants
Le chemin optique est lié au trajet géométrique du faisceau optique. Or, dans le cas d’une simple couche atomique d’un matériau à deux dimensions, sa faible épaisseur ne pourrait fournir des chemins optiques assez élevés pour modifier suffisamment le faisceau optique. Mais les chercheurs ont su exploiter les propriétés dues aux diverses interfaces pour, par exemple, obtenir un Lo géant de 38 nm pour une seule couche de MoS2 d’une épaisseur de 0,67nm.
La figure ci-dessous indique les chemins optiques géants obtenus pour des dépôts allant de une à quatre couches de MoS2.
Le caractère géant des chemins optiques est dû aux fortes réflexions multiples qui ont lieu aux interfaces air-MoS2 et MoSiO2– SiO2. La figure 2 ci-dessous explicite cela.
La fabrication d’un miroir concave ultra-mince
Pour fabriquer le miroir concave le plus fin au monde, les chercheurs sont partis d’un film uniforme de 9 couches de MoS2 (6,28 nmd’épaisseur) . A l’aide d’une sonde ionique focalisée, on creuse un profil en bol (de 20 nm de diamètre) dans le film. On obtient ainsi un miroir concave de taille atomique.
C’est un miroir concave d’une extrême finesse qu’ont réussi à fabriquer les chercheurs australiens. C’est par microscopie optique à balayage qu’a été caractérisé le micro-miroir. La mesure de sa distance focale f est de -240 µm, en excellent accord avec la valeur calculée à partir du profil de chemin optique mesuré par interférométrie.
La molybdènite se montre aussi infiniment plus efficace que les autres matériaux 2D typiques évoqués plus haut pour la réalisation de réseaux de diffraction très nécessaires pour le contrôle avancé de la lumière.
La figure ci-dessous schématise le réseau ultra-fin réalisé en films minces de MoS2.
L’extrême uniformité d’épaisseur et la perfection des surfaces atomiques des matériaux 2 D à haut indice de réfraction fournit un moyen extraordinairement précis de contrôler le front des ondes lumineuses. Les chercheurs australiens ont observé des chemins optiques géants dans d’autres métaux de transition dichalcogénides que MoS2. Cela ouvre de riches opportunités pour la construction d’hétéro-structures optoélectroniques par empilement de couches fines de tailles atomiques. Enfin des composants optiques à deux dimensions présentent un avantage de fabrication comparé aux composants conventionnels 3 D car différentes fonctionnalités peuvent être obtenues dans un seul processus de fabrication 2D.
Pour en savoir plus :
Atomically thin optical lenses and gratings, Jiong Yang, Zhu Wang, Fan Wang, Renjing Xu, Jin Tao, Shuang Zhang, Qinghua Qin, Barry Luther-Davies, Chennupati Jagadish, Zongfu Yu and Yuerui Lu
Light: Science & Applications (2016) 5, 11 March 2016, e16046