Un endoscope constitué d’une seule fibre optique
Les endoscopes sont très utilisés pour voir des objets inaccessibles tant dans l’industrie que dans la pratique médicale. Dans ce dernier cas, il peut s’agir d’un endoscope rigide ou flexible, mais il est toujours constitué d’un tube mince qu’on peut insérer dans le corps et qui permet d’avoir des images de l’intérieur de celui-ci. Des chercheurs de Corée du Sud et des Etats-Unis ont réussi à fabriquer un endoscope qui, à la différence de ceux, classiques, à faisceau multifibres, est fait d’une seule fibre optique de 200 micromètres de diamètre.
Ceci entraîne la réflexion totale de la lumière à l’interface cœur-gaine. La lumière réfléchie de multiple fois est donc confinée dans le cœur. Un rayon lumineux se propagera d’un bout à l’autre de la fibre en zig-zaguant.
Mais si on veut utiliser une telle fibre pour obtenir une image endoscopique par réflexion de la lumière, on se heurte au problème de la dispersion de modes et à celle due aux défauts de géométrie. La lumière injectée dans la fibre sera déformée et cela aussi bien à l’aller qu’au retour.
C’est pour cela que l’on utilise un faisceau de fibres dans les endoscopes actuels. Chaque fibre du faisceau transporte un pixel de l’image. Pour obtenir une haute résolution, il faut augmenter le nombre de fibres et donc le diamètre de l’endoscope, ce qui diminue sa facilité d’insertion.
L’élimination des effets de la dispersion
Wonshik Choi et ses collègues de l’Université de Corée à Séoul ainsi que des chercheurs de l’University of Pennsylvania, Philadelphie, Pa, USA et du Massachusets Institute of Technology, Cambridge, Ma, USA ont réussi à caractériser l’effet des dispersions sur les différents modes d’ondes présents dans la fibre et, à l’aide de cette information, à reconstruire une image nette.
Ils ont appelé cette méthode micro-endoscopie sans objectif par une fibre unique, en anglais lensless microendoscopy by a single fiber, qu’on désigne par l’acronyme LSMF.
Avant d’utiliser une fibre optique pour l’endoscopie, ils étalonnent ses caractéristiques de transmission optique (obtenant ce que les physiciens appellent la matrice de transmission) pour pouvoir compenser la distorsion subie durant son aller-retour par la lumière détectée. Pour cela, on applique un faisceau laser à un bout de la fibre et on mesure intensité et phase de la lumière émergente à l’autre extrémité. On accumule 15000 images correspondant à autant d’angles d’incidence différents sur la fibre. Cette opération a une durée de 30 secondes que l’usage d’une caméra rapide pourrait réduire.
Le montage expérimental
Pour obtenir l’image LMSF, le faisceau d’un laser Hélium-Néon classique de longueur d’onde 632 nanomètres est divisé en deux par un cube séparateur(BS1). Le faisceau qui va vers la fibre est réfléchi sur un miroir de balayage galvanométrique (GM) à deux axes. Après avoir été réfléchi par un deuxième cube séparateur(BS2), le faisceau est couplé à la fibre optique à son plan d’entrée IP et se propage jusqu’à l’objet du plan OP qu’il éclaire à la sortie de la fibre.
La lumière réfléchie par l’objet est collectée par la même fibre optique de 1 m de long et de 200µm de diamètre de cœur. Elle est guidée jusqu’à l’entrée de la fibre, traverse deux cubes séparateurs et est enregistrée par la caméra. Le faisceau laser réfléchi par BS1 se combine avec celui venant de la fibre pour former une image d’interférences dans la caméra.
De celle-ci est extraite par calcul amplitude et phase de l’image venant de la fibre. En utilisant la matrice de transmission mesurée précédemment, on reconstitue enfin à l’aide d’un ordinateur l’image finale. La résolution de l’image est de l’ordre de 1,8 µm. Le champ est de l’ordre du diamètre, 200 µm, de la fibre.
En outre, il existe une distorsion de la lumière éclairant l’objet due à l’effet de tavelures.
On s’en affranchit en balayant les anges d’illumination grâce au miroir galvanométrique. On prend 500 images sous différents angles d’illumination : leur moyenne supprime l’effet des tavelures. Et cela ne prend qu’une seconde, ce qui détermine le temps d’acquisition de l’image.
En déplaçant légèrement la fibre latéralement, on peut augmenter le champ de l’image, ce que met en évidence la figure 2.
La figure ci-dessous est un schéma plus détaillé de l’appareillage utilisé pour la prise de vue et l’étalonnage de la fibre.
L’utilisation de l’ordinateur pour corriger les distorsions de l’image peut paraître une complication mais cela est beaucoup moins onéreux que fabriquer des endoscopes classiques de haute qualité optique.
L’un des problèmes de cette technique est que la fibre ne peut pas être déformée beaucoup à partir de la forme qu’elle a lors de son étalonnage. l’endoscope ne peut pas être aussi flexible que la fibre. Mais l’équipe de Wonshik Choi envisage de pratiquer l’étalonnage in situ , ce qui résoudrait ce problème.
L’obtention du relief par refocalisation numérique
L’un des grands intérêts d’avoir de nombreuses images couvrant un large domaine d’angle d’incidence est aussi qu’elles peuvent facilement être utilisées pour construire une image 3 D. Sur la figure 4 c, on peut voir que l’image originale b) nette au point B a pu être refocalisée numériquement en un point A situé à 40 µm vers l’extrémité de la fibre. Cette refocalisation numérique permet d’explorer le relief de l’image sans avoir à faire de balayage en profondeur à la prise de vue.
L’équipe de chercheurs met au point un endoscope rigide qui, outre son extrême finesse aura une résolution de moins d’un micromètre, bien supérieure à celle des endoscopes actuels. Et on peut très facilement insérer la fibre optique dans une aiguille de biopsie, en prenant l’image d’un tissu biologique devant la fibre, on pourrait obtenir un diagnostic in situ pour nombre d’affections.
La vidéo suivante représente le processus de reconstruction au cours du temps de l’image en LMSF. Les angles indiqués à gauche sont les angles d’incidence de l’éclairage sue=r la fibre (θx, θy)s.On voit, à gauche, une suite d’ images distordues enregistrées par la caméra, au milieu une suite de reconstructions d’images après utilisation de la matrice de transmission . La figure de droite est la somme moyennée des images du milieu, ce qui supprime l’effet des tavelures et donne une image finale nette.
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Crédit Wonshik Choi.
Pour en savoir plus :
Scanner-Free and Wide-Field Endoscopic Imaging by Using a Single Multimode Optical Fiber
Youngwoon Choi, Changhyeong Yoon, Moonseok Kim, Taeseok Daniel Yang, Christopher Fang-Yen, Ramachandra R. Dasari, Kyoung Jin Lee, and Wonshik Choi
Phys. Rev. Lett. 109, 203901 (2012)